samedi 26 octobre 2013

NUIT (1)

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Contemplation, espace et distance. 

Qui comprend aujourd'hui que l'esprit se révèle à la nuit? Le monde des corps appartient, lui, au jour. La nuit; cette dame enchanteresse, admirable consolatrice des âmes en dérive dans leurs questionnements sur une existence sans cesse à questionner; nourricière de l'esprit, généreuse, fidèle et fuyante, à l'aspect austère et pourtant rassurant. Faut-il être écrivain, peintre ou malheureux pour s'abandonner à la déesse noire et céleste? Elle sait draper d'un voile les passions qui nous assomment. Elle offre le silence, remède aux âmes déchirées, le vide, la conscience, l'intériorité, la distance à la matérialité; cette fabrication du déchainement annoncée dans la déflagration du noir brut au lever du jour. Là, le monde des corps s'active dans une respiration haletante à la recherche du progrès et sa stimulation brutale, scientifique, plombante, artificielle. Le monde quantifié, solide, inaltérable. Mortelle avalanche des humains avariés nourrit d'une majesté maintenant évanouie.
Que les jours soient des nuits et ces nuits éternelles et fleurissantes. Mais une nuit de l'esprit, une nuit plus céleste que celle de l'atmosphère, sans la tutelle de cette déesse trop attachante. Juste la délivrance dans le vide et l'obscur, au sein d'un monde éteint du feu des passions et ses activités aliénantes. Où resplendit au loin la sainte bienveillance du divin depuis son temple hospitalier aux chambres infinies. Éteint le feu de l'esprit et le feu terrestre s'éteindra. C'est donc ça. L'esprit plus fort que la matière. Le corps soumis à l'esprit, la volonté, l'intelligence. Un soleil englouti sur l'horizon terrestre agonisant de lueurs de sang qui en font la beauté. C'est la métanoïa, la plongée intérieure au sein du monde liquide débarrassé des pesanteurs du jour. La ligne d'horizon s'est tue, les mers et les cieux ne font plus qu'un dans l'unité sainte de la nuit et sa couleur impartiale.
Chaque nuit est un cycle, une vie, un humain, un esprit.



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